lundi 13 novembre 2017

13/11 - La carte (postale) et le territoire...

Nous sommes rentrés depuis une semaine, mais le voyage n’est pas fini… Les images et les émotions se bousculent dans la tête, j’y pense jour et nuit.


Pour calmer ce tumulte, il faut raconter...


Lorsque nous voyageons, nous ne cherchons pas particulièrement la "carte postale" ou le cliché touristique. Nous avançons lentement, nous regardons de chaque coté de la route, et nous voyons ce que nous voyons. Et tant pis si çà ne correspond pas à ce qu'on lit dans le "routard" ou le "lonely planet", ou à ce que répètent les accompagnateurs professionnels.

C'est ce que j'ai voulu raconter dans ce blog. Cela n'engage que nous et ne reflète que ce qui a traversé notre champ de perception.

Le vélo permet cela, car on est dessus et non dedans, toujours en contact avec le paysage, le vent, la chaleur, les odeurs, la pluie, les gens. Pédaler maintient les sens en éveil (sinon on tombe...) tout en laissant le temps de la réflexion...

Il ne faudrait donc surtout pas lire ces lignes comme des généralités, mais comme une tentative de conclure ce voyage en essayant d’expliquer ce que nous avons vécu, sans idéalisme ni ethnocentrisme.

Les paysages Vietnamiens sont-ils beaux ?


Les paysages Vietnamiens sont-ils beaux ? Oui et non. Bien sûr, ces rizières en terrasse qui découpent les montagnes et les vallées en tranches horizontales, c’est magnifique. Cela peut faire de très belles photos si la lumière et la saison s'y prêtent... mais ce n'est pas beau au sens romantique du terme. Dans la "vallée des photographes", on voit des femmes et des hommes qui travaillent tout le long de l’année dans les rizières. Ils ne cherchent pas la beauté, mais seulement à gagner leur vie. Quant aux fameux pics karstiques de Ninh Binh (la "baie d'Halong terrestre"), c'est un paysage grandiose et étonnant. De près c'est aussi une jungle sauvage et escarpée, sur une roche grise, dure et coupante. On ne s'y promène qu'en bateau ou lorsque des escaliers de pierre ont été aménagés.

Partout dans les rues et au bord des routes, des déchets, des débris en tout genres, des décharges à ciel ouvert. Les services de ramassage d'ordure sont rudimentaires (grandes brouettes) ou inexistants. Les sacs en plastiques sont distribués par milliers, parfois juste pour y mettre une mangue ou un morceau de viande. On les retrouve partout : "Mère nature" n'est pas au sommet de l'échelle des valeurs ! Ici, la notion d'écologie (ecopark, ecolodge, ...) renvoie au bien-être matériel et à l'individualisme, et bien peu au "développement durable".

Ce qui rend ce pays si attachant et le voyage si passionnant, ce sont les gens !


Nous n'avons pas fait beaucoup de pagodes ni beaucoup de musées. Nous n'avons pas fait la "Baie d'Halong". A part Sa Pa et, dans une moindre mesure, Ninh Binh, nous sommes donc restés à l'écart des circuits touristiques, préférant respirer, voir, entendre l'ambiance de la rue ou de la campagne, sentir l’humidité, la chaleur ou le froid, regarder les Vietnamiens vivre et travailler.

Mais ce qui est fascinant et rassurant à la fois, c'est que même dans ces endroits où le tourisme de masse dévore l'espace et altère les comportements, "la vie" est toujours là, omniprésente et modeste, bien plus organisée qu'elle n'en a l'air. Elle perce obstinément la carte postale proprette et colorée des dépliants touristiques, comme les racines d'un arbre dans la ville finissent par percer le bitume et soulever le trottoir.

Dans ce grand musée, on voit ce qu’on voit...


Pendant ces 3 semaines, nous avons visité un grand musée à ciel ouvert. Il est ouvert 24 heures sur 24. Il est immense, varié, vivant. C’est le musée de la nature grandiose et sommairement aménagée, et aussi des ressources naturelles pillées, de la ville chaotique, des chantiers jamais finis, des déchets partout, de la circulation à la fois trépidante et débonnaire, de l’air chargé de fumées, des restaurants de rue, des labeurs incessants, des joies, des sourires, des rencontres, des moments de sérénité, …

La vie, quoi...

dimanche 12 novembre 2017

12/11 - Confucianisme, pacifisme, capitalisme

Un jour dans une rue commerçante de Hanoï, nous voyons une vieille dame assise sur les marches à l'entrée d'un commerce de luxe. Elle ne mendie pas. Elle n'est pas chassée non plus. Passe un vendeur de soupe à peine mieux loti qu'elle. Il s'arrête et lui offre spontanément un bol de soupe, qu'elle accepte. Elle ne dit pas merci. Il repart...

Une autre fois, dans l'ascenseur de notre "village vertical", un homme avec à la main une liasse de billets épaisse comme le code du travail... Même au cours actuel du Dong, ça fait une somme. Pas de regards en coin, personne n'est choqué ni ne manifeste la moindre émotion...

Dans un village, à l'écart de la route principale, un superbe "palace nouveau riche" avec façade immaculée, fioritures dorées, coupole sur le toit. Juste en face, une baraque délabrée, du linge sèche sur le fil...

Des 4x4 noirs climatisés, propres et brillants, sans une égratignure, circulent difficilement parmi les motos utilitaires transportant familles entières, cochons, agrumes, matériaux de construction... Pas d'énervement, pas d'agacement...

Nous sortons du "Home City" ultra-moderne et luxueux, nous traversons la rue Trung Kinh et pénétrons dans une venelle traversière étroite : plus de bitume, plus de trottoirs, bidonvilles sombres et délabrés, un bond en arrière dans les années 70. Nous n'avons fait que traverser la rue... 

Dans les maisons on se déchausse, mais on ne trie pas les poubelles. On jette partout les sacs en plastiques et les déchets en tout genres...

Dans les rues de Hanoï, des torrents de motos pétaradantes, des odeurs de carburant, les fumées des braseros. Un smog permanent qui masque parfois le haut des tours. La pollution est flagrante et sa cause évidente. On se couvre le visage de masques chirurgicaux, et on continue...

A la sortie des écoles, du plus reculé des villages aux plus grandes villes, les mêmes sourires, les mêmes uniformes impeccables, les mêmes vélos sur lesquels on pédale fièrement...

Alors que les impressions et les images se bousculent encore dans nos têtes, nous voulons comprendre, nous cherchons des explications. Nous avons besoin de cela pour apaiser le feu des émotions, terminer vraiment le voyage et passer à autre chose...


Respect, bienveillance et solidarité


Dans la société Vietnamienne, les rapports entre les gens sont pyramidaux : On doit le respect aux ancêtres et aux plus anciens que soi, et en retour on bénéficie de leur solidarité et de leur bienveillance. Chacun trouve sa place, si modeste soit-elle. Les relations sont pacifiques, les inévitables conflits sont réglés avec diplomatie et discrétion, les moins chanceux peuvent bénéficier de l'aide de la communauté.

Les mêmes relations communautaires et pyramidales se retrouvent partout dans la société : dans les familles, les quartiers, les immeubles, au travail, dans les rues, dans les relations sociales… Et je pense qu’on pourrait même expliquer de cette façon l'efficacité de la circulation vietnamienne : je dois le respect au véhicule plus gros que moi, et je sais qu’il fera tout son possible en retour pour éviter l’accident…

L’histoire officielle nous dit qu’Ho Chi Minh était un homme de paix, qu’il a été contraint à la guerre par les français qui, sur le terrain, cherchaient la bagarre et ne respectaient pas les accords de Genève. C’est l’histoire officielle, mais c’est crédible. Les vietnamiens sont véritablement pacifiques.

Pacifisme, diplomatie, respect, bienveillance et solidarité forment un ciment puissant : ça doit être cela qu’on appelle « la morale confucéenne ».

Au pays des enfants heureux...


Presque partout nous avons vu des gamins heureux. Les sorties des écoles étaient toujours des moments émouvants. Chez nous, nous dirions que les enfants sont "pourris-gâtés". Là-bas, cela semble juste normal. L'enfant est roi. On lui pardonne tout. Comme si on lui disait : "profite parce que quand tu seras grand çà sera une autre chanson".

Il est permis de se débrouiller...


Le Vietnam s'est converti à l'économie de marché au milieu des années 80, à la suite de la Chine. (le Đổi mới). Cela surprend les occidentaux que nous sommes, qui ne comprennent pas comment on peut être à la fois capitaliste et marxiste-léniniste, à la fois exploiteur et exploité...

Et tant qu'à faire, on n'y est pas allé à reculons. Le capitalisme est ici dans sa version néo-libérale presque pure : peu de règles, peu de protection, peu de taxes et par conséquent peu de services publics. Du plus modeste auto-entrepreneur non déclaré, qui chaque jour va vendre ses citrons sur le marché, jusqu'aux plus grandes entreprises étatiques privatisées, chacun cherche son bénéfice.

Tentons une explication : Si le confucianisme règle les rapports entre les individus et leur promet une place dans la communauté, il ne signifie pas "immobilisme" : on peut (on doit ?) prendre en main son propre destin, améliorer son sort par ses propres mérites et sa propre énergie, pourvu que la justice et l'équité soient garanties.

Ainsi, pas de "lutte des classes", pas de jalousie ni de ressentiment : chacun semble satisfait de son sort puisqu'il lui est permis de se débrouiller pour l'améliorer.

Et tant pis si la théorie du ruissellement ne fonctionne qu'au goutte à goutte...

Et le communisme dans tout ça ?


A part la grande esplanade stalinienne devant le mausolée Ho Chi Minh de Hanoï, les drapeaux rouges, les affiches révolutionnaires, les nombreux portraits et bustes d'Ho Chi Minh sur les bâtiments administratifs, difficile de se dire qu'on est dans un des 4 derniers pays officiellement communistes de la planète...

Le modèle de société que la télévision propose à travers ses publicités est le même que le nôtre : consumériste, hédoniste et petit-bourgeois. La revanche des occidentaux...

Les vietnamiens sont-ils encore communistes ? L'ont-il vraiment été un jour ? Disons que le communisme fait partie du paysage...

Mais ce qui à mon avis structure davantage la conscience politique de la population, c'est la fierté partagée d'avoir chassé les colonisateurs, d'avoir relevé le pays et de tenir désormais son rang dans le monde. L'histoire - surtout l'histoire récente - tient ici une grande place. Toute personne de plus de 50 ans a, part définition, connu la guerre et les privations. Mais on ne ressent aucune nostalgie, ni haine, ni ressentiment.

La page est tournée, allons de l'avant...

Si vous voulez vous faire votre opinion, je vous recommande ce livre : "Vivre avec les vietnamiens" - Philippe Papin et Laurent Passicousset.
(ISBN : 978-2-8098-0335-8)










samedi 4 novembre 2017

04/11 - Du feu dans la cheminée


Fin du voyage (?...)



Nous sommes rentrés cet après-midi dans le froid et la grisaille, après ces 3 semaines de douce chaleur et d’amitiés. Première chose en arrivant à la maison : un feu dans la cheminée.

Difficile d'écrire une fin, quand on est encore "entre deux eaux" : Contents d'être arrivés mais triste d'être rentrés... les pieds en France mais la tête encore loin...

Alors, avant de tenter une conclusion plus philosophique, je vais commencer par le plus facile et pour ceux que cela intéresse : les faits et les chiffres.

L'itinéraire


Presque 1000 kilomètres en 3 semaines, dont la moitié en montagne.



Les vélos


Pas de soucis, à part les freins, prématurément usés par la boue et la poussière, dans les grandes descentes.

Nous avons expérimenté le transport en "cartons Air France". Pas de dégâts, une économie de poids et un démontage/remontage plus aisé. Au final, bien plus pratique que les valises spéciales, même si ce n'est pas encore idéal.

La navigation


Le GPS (Garmin Etrex 25) nous a été d'une grande utilité. Il nous a discrètement guidé à bon port à chaque fois que nous le lui avons demandé. Inconvénients : les altitudes sont aléatoires et - sur ce modèle - il est impossible de charger des parcours sans passer par un ordinateur (que nous n'avions pas). Garmin ne propose pas de fonds de cartes payants pour le Vietnam. J'avais donc chargé à l'avance les itinéraires et les dalles OpenCycleMap nécessaires. Sauf pour Hanoï, elles sont très incomplètes et le petit indicateur de position est souvent "dans du blanc". Au moins quand une route est représentée, l'itinéraire est fiable et on sait où on est.

Notre ami Quynh en sait quelque chose : il enregistre scrupuleusement toutes les traces, toutes les coordonnées et tous les points d'intérêt que nous rencontrons, afin de contribuer à la mise à jour des cartes open source et ainsi, comme il le dit lui-même, "joindre l'utile à l'agréable".

L'hébergement


A Hanoï nous avons eu la chance d'être hébergé dans un appartement tout neuf que les parents de Trang n'utilisent pas encore : le fameux "Home City".

Le reste du temps nous avons dormi dans des "Nha Nghi", littéralement "maisons de repos". Ce sont des petits hôtels familiaux. Le confort va du très spartiate au normal, avec les spécificités vietnamiennes : douche et toilettes "tout en un", climatisation, matelas "dur" (plaque de polystyrène).

Prix moyen : 300000 Dongs, soient 11 euros.

La nourriture


A Hanoï nous avons très souvent déjeuné ou dîné avec la famille de Trang. Cuisine familiale, donc, mais améliorée : la maman avait à coeur de nous faire goûter à chaque fois des choses différentes.

En montagne ou à Ninh Binh, nous avons le plus souvent pris nos repas dans des restaurants de rue (Binh Danh = restaurant populaire). Les plats sont simples, mais chaque restaurant a sa spécialité.

Prix d'un repas : 30000 Dongs (1,10 Euro)

La météo


Le mois d'octobre est en principe le début de la saison sèche dans le nord du pays. Apparemment, cette année il y avait un peu de retard...

Un typhon a balayé la région juste avant notre arrivée. Il y a eu des dégâts et des victimes. Nous nous sommes demandés s'il était bien opportun d'aller jouer les touristes dans ces circonstances. Finalement, nous n'avons rien changé. Les traces du typhon étaient visibles un peu partout, mais la vie avait déjà repris son cours...

La première semaine le temps a été frais et humide, mais c'était dû aussi à l'altitude. ensuite, le vent du nord a progressivement remis les choses en place. Douceur et soleil sont revenus.

Photos

L'album complet, trié : https://photos.app.goo.gl/WY9K9EvgtdYkwqmy7

le "best of", sans les couleurs : https://photos.app.goo.gl/GSaCdAcNGX1K8EDSA

jeudi 2 novembre 2017

02/11 - Manuel de savoir-vivre Vietnamien (version ultra-simplifiée)

  1. Enlever ses chaussures en entrant dans une maison ou un appartement. Si on doit le faire souvent (visite des tontons et tatas à Hanoï, par exemple...) mieux vaut avoir des tatanes sans brides derrière.
     
  2. Mettre les "tatanes de patouille" pour aller dans les pièces d'eau. Explication : les pièces d'eau sont "tout-en-un" : toilette, lavabo et douche. Il n'y a pas de bac de douche, et parfois même le lavabo n'a pas d'évacuation. Le sol est presque toujours mouillé. Donc à l'entrée il y a toujours des paires de tatanes en plastique que l'on met pour éviter de se mouiller les pieds et d'en mettre partout en ressortant.
     
  3. Ne pas garder aux pieds les tatanes de patouille une fois sorti de la pièce. Là, c'est le meilleur moyen de passer pour un gros nul et faire rire tout le monde (vécu...). Ça équivaut à peu près à mettre le rouleau de PQ sur la table pendant le repas...
     
  4. Manger par terre. Le repas traditionnel se prend à même le sol. S'asseoir par terre suppose une certaine souplesse, même quand on est très âgé (voir ci-dessous la règle n°12). Tous les mets sont amenés en même temps sur un grand plateau métallique. On sert le riz dans le petit bol et on met par dessus les autres aliments. A la fin, le riz est imbibé de tous les jus de cuisson. On rajoute du bouillon et on finit le bol. Tout repart sur le grand plateau métallique : la table est débarrassée et la vaisselle bientôt faite...
     
  5. Manger avec des baguettes. Ça vous paraît peut-être évident, mais essayez de manger une cuisse de poulet entière sans y mettre les doigts, sans même un couteau. Il ne s'agit plus de pincer délicatement un petit morceau, comme on ferait dans un restaurant asiatique en France, mais de bloquer toute la bestiole pendant que vous la déchiquetez avec les dents, en évitant de catapulter le tout à l'autre bout de la pièce ! Moment de solitude...
     
  6. Respecter la sieste. Après le repas de midi on fait la sieste, même au travail, même dans les entreprises. Entre midi et deux heures tout est calme dans les villages.. les motos sont à l'arrêt, les chiens sont étalés par terre (bon, eux c'est toute la journée. Ils ne se réveillent que le soir).
     
  7. Boireleter. (je boirelete, tu boireletes, nous boireletons, vous boireletez... merci M. Bigard !). Le thé vert est toujours prêt. Il est en libre service à peu près partout. On en boit par petites tasses à la fin des repas ou à tout autre moment de la journée.
     
  8. Fumer la pipe à eau. Comme le thé, la pipe à eau en bambou est en libre service dans les restaurants de rue (non, je rigole, on n'est pas obligé).
     
  9. Vivre à l'heure du soleil. Même au nord du pays on reste dans la zone tropicale. Le jour se lève (brutalement) vers 6h et la nuit tombe (brutalement) vers 17h30. Donc si on veut en profiter, il faut décaniller...
     
  10. Négocier. Proposer un prix au moins deux fois inférieur à celui annoncé. Arriver "presque" à un accord et s'en aller. Si le vendeur vous rappelle, c'est gagné. De toute façon, si l'affaire se fait tout le monde sera content. Je vous raconte ça comme si on maîtrisait... En réalité on n'est vraiment pas à l'aise. On s'en sort très mal et on a sans doute très souvent payé "le prix des touristes".
     
  11. Répondre en vietnamien (Xin Chao) quand on vous dit bonjour (Hello !) dans la rue : c'est presque à tous les coups récolter un éclatant sourire, ou une chaleureuse "poignée à deux mains", voire une invitation à boireleter (voir règle n°7).
     
  12. Faire sa gymnastique tous les jours le matin et le soir dans la rue (ou dans la salle de sport de l'immeuble, quand on est moderne), quand la chaleur est supportable et l'air pas trop irrespirable. ça permet de continuer à s'asseoir par terre avec souplesse très longtemps...

02/11 - Trois petits vélos le long du grand fleuve

Nous décidons de revenir à Hanoï à vélo, pour baigner encore un peu dans cet environnement si constrasté, fait de nonchalance et d'activité incessante, de sourires éclatants et de visages ahuris, de richesse étalée et de pauvreté digne, d'écoles toutes pimpantes et de hangars gris servant d'habitations.

Et les gamins heureux, le plus souvent...

Dans ce pays rien n'est jamais fini. Tout est en chantier, tout bouge. On démolit, on construit, on achète, on vend, on sème, on récolte. çà n'arrête jamais.

De Phu Ly à Hanoï il y 60 km à vol d'oiseau. Le challenge, c'est de ne pas passer par la QL1 (la nationale 1) mais de rejoindre le fleuve rouge en espèrant que les digues seront praticables, et sans changer de rive pour éviter de devoir repasser un grand pont en arrivant dans la ville.






Çà s'est passé à peu près comme ça, à quelques détails près :
  1. Vent dans le nez toute la journée. Certes il est rafraichissant, mais rouler sur du plat pendant 90 km en ayant l'impression de monter, c'est rageant.
  2. La route sur le sommet de la digue est faite de plaques de ciment disjointes ou disloquées. Parfois, il n'y en a même plus. C'est un chemin de terre sableuse parsemé de nids de poule (avec éventuellement les poules dedans). çà tabasse et çà desserre les boulons !
  3. Bien sûr, tout le long du fleuve se succèdent briquetteries, cimenteries et carrières de sable. Les camions surchargés fument, puent et soulèvent la poussière.
  4. Et les odeurs... les pans inclinés de la digue servent ici et là de décharge à ciel ouvert. ça sent le pourri et le cadavre.
J'ai l'air de râler, mais - encore une fois - on l'a choisi ! Et tout cela fait partie du voyage. On n'est pas venu ici pour les cartes postales !

Dans le smog au loin on distingue les tours de Hanoï et on devine les grues.

Petite pause café au frais en contrebas de la digue avant les 20 derniers kilomètres. Trang souffre un peu à cause de la selle, mais par rapport à 2015, elle a beaucoup gagné en tonicité. Les 90 kilomètres seront avalés sans difficulté ni grosse fatigue.

Nous arrivons en ville. Nous nous faisons notre petite place dans la circulation frénétique. Il est 16h30, c'est l'heure de pointe. Pourtant, on avance à un bon 15 à l'heure, pratiquement sans s'arrêter.

Se faufiler, anticiper les mouvements des autres, ne pas se faire coincer par un bus, couper le flux pour aller à gauche, ne jamais regarder derrière, ne jamais s'arrêter à un carrefour (sauf éventuellement s'il y a un feu)... On fait maintenant tout cela sans même y penser. Mais attention au retour au France !

Nous arrivons dans notre "village vertical" (l'immeuble "Home City") à la nuit tombante. Nous dînons au calme, dans le restaurant végétarien du 4ème étage.


Demain, repos, emballage des vélos. Peut-être un dernier petit tour en ville pour dépenser "nos millions" ? (1 million de Dongs = 37 euros).

mercredi 1 novembre 2017

01/11 - Les chemins de poussière

La dame du Nha Nghi a remarqué que nous aimions les bananes. Elle est allée faire ses courses ce matin et nous en a ramené 4 kilos ! (pour 20000 Dongs, soient moins d'1 euro).

Nous saluons chaleureusement nos hôtes et retournons visiter le village de Kenh Ga. Nous franchissons plusieurs ponts mobiles à péage. Pause-banane.


Au bout d'une petite voie cimentée, on s'assoit. Un gamin arrive. Il habite avec ses grands parents. Il ne va pas à l'école et n'a rien mangé ce matin. ça fait tout drôle de voir un gamin triste...

10 Km plus loin, nous arrivons à Vân Long. Pause-banane. C'est un site entièrement naturel qui se visite aussi en barque. 2 heures de tranquilité au rythme du clapotis des rames...




Pause banane. Notre étape de ce soir sera la ville de Phu Ly, en direction de Hanoï sur la QL1. Mais nous voulons tout faire pour éviter la grande route et sa circulation infernale. Au début nous avançons parallèlement sur des petits chemins dans les rizières. Pause banane (burp!). Les personnes que nous croisons nous regardent d'un air ahuri ou nous prennent pour des fous lorsque Trang leur explique ce que nous faisons.


Le Garmin m'indique ensuite une route secondaire qui longe une rivière. Pause banane. Sur le petit écran, çà à l'air sympa. Mais, "la carte n'est pas le territoire", comme on dit. Et sur le terrain c'est autre chose.

Finis la jungle et les lacs tranquilles. La montagne est toujours là, mais c'est comme s'il en manquait une moitié. Elle est grignotée sans relâche par les excavatrices pour en faire des matériaux de construction. La poussière forme un brouillard dense. C'est comme si toutes les cimenteries du pays s'étaient regroupées ici. La rivière, idéalement orientée le long de la montagne, sert à l'acheminement des matériaux. Le massacre est bien organisé.

Nous, nous avons échappé à la circulation mais nous roulons dans la poussière... Pause banane quand même.

Nous arrivons à Phu Ly. L'hotel de ce soir sera confortable : Deux chambres communicantes pour 350 000 Dongs (13 euros). Au menu ce soir : pain, banane, vache qui rit, banane, yaourt, banane, mangue, banane, chocolat, banane.